Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/24

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ce même noir de fumée, une demoiselle à taille lisse, aux yeux d’eau moirée de bleu turquoise, d’un bleu-vert changeant, une tête de ce teint de poupée touchée de rouge corail aux joues, ayant surtout cette bouche douloureuse, de ligne pure, se virgulant aux coins d’on ne savait quelle ironie embusquée… devant se révéler plus tard, trop tard ! Il ne comprenait pas du tout ce qui lui arrivait. Ce masque tragique, ce n’était ni sa fiancée ni sa femme… c’était une Céline inconnue, victime ou bourreau ? Il eut un mouvement convulsif qui lui fit faire une embardée et il cria, involontairement, absolument comme il aurait juré :

— Ah ! Céline, vous ne devriez pas vous coiffer comme ça. Ce ruban de satin blanc vous coupe le front en deux… C’est idiot, la mode ! D’autant mieux que ça n’est pas nouveau… J’ai vu une gravure qui…

Mais il n’arriva pas à se souvenir de quelle gravure il était question.

Elle avait senti, elle, dès que son bras l’avait lâchée, que la partie était perdue. Pourquoi ? Sait-on jamais ce qu’une jeune fille de dix-sept ans peut espérer de l’amour ? On partait pour une contrée inexplorée : la lune de miel.