Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/55

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cette ville maudite où l’on estampe cruellement les jeunes mariés et où on ne leur permet même pas de…

Il bredouilla un peu, lui pinça l’oreille sous la coque de ses cheveux noirs, puis la poussa ers la voiture, au milieu de la foule très amusée par cette petite mariée récalcitrante.

— Voyons, Céline, je vous en prie, j’ai horreur des femmes qui font la tête ! Vous me douteriez envie de retourner à la taverne pour me griser tout à fait ! Montez ! C’est idiot !

Elle monta, s’ensevelit dans les fourrures et le vent de la course emporta de nouveau la torture de son rêve aux prises avec l’atroce réalité.

La route blanche entre deux haies de fantômes. Ce sont des pins immenses plantés à perte de vue comme des poteaux de supplices. La lueur des phares éclaire le fonds d’un reflet rougeâtre qui fume. Où commence l’arbre, où finit-il ? Les yeux de Céline, tout cuisants de larmes, les mesurent désespérément à sa petitesse de femme captive, à sa faiblesse de nouvelle amante éprise de l’impossible amant. Elle ne réagissait plus contre l’emprise de cette mort très douce qui lui venait dans le vent