Aller au contenu

Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

mense glace qui le sépare de moi ! J’ai tellement la frayeur de voir tout s’évanouir…

Le maître de la maison s’arracha, en soupirant, aux frêles mains jointes, qu’il dévorait de caresses violentes, pour se diriger vers la grande baie, l’image du parc merveilleux que l’on croyait fausse. Il pressa sur un bouton d’ivoire, les plafonniers s’éteignirent et la glace descendit lentement dans le sol. Alors l’air pur, la lumière pâle de la lune firent irruption dans le boudoir, et ce fut la nature tout entière qui s’empara de la jeune fille. Elle savait maintenant que son rêve prenait corps parce que la brise nocturne venait de lui souffler dans les cheveux. L’homme avait créé une illusion d’amour, mais il ne pouvait pas lui donner ce parc sans la suprême complicité de la vie ; or, c’était là qu’elle voulait aimer.

Elle redoutait, malgré sa confiance en lui, la complication des monstres chinois, des fleurs trop artificielles par leurs odeurs forcées en serre et des coussins aux mollesses énervantes.

Elle était normalement pure, elle. Pourquoi aurait-elle évité le grand jour ou la grande nuit ? Oh ! être libre… près de lui.