Page:Rachilde - L’heure sexuelle, 1900.djvu/64

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modèles impeccables, au moins de formes, relève sa face de lion roux, tire une bouffée :

― On ne peut cependant rien ficher sans elles.

Et il ne dit pas ficher.

Andrel hausse les épaules.

— En sculpture ?… (Il ajoute, malicieusement :) Vous, Massouard, vous ne devriez pas dire ça, car ce n’est pas la nature qui vous inspire : vous faites si large !

Massouard grogne. Il est avéré que ce brave génie de sculpteur voit trop large.

Depuis qu’il travaille, il a pétri une série de bonnes femmes fabuleuses, hautes comme des clochers ; minces ou épaisses, elles ont toutes le visage perdu dans le ciel, des expressions de torture ou de joie qui ne sont nullement à la portée de notre œil. La dernière, commandée par l’État, n’a pas pu passer par l’antichambre de la salle de mairie où on voulait la mettre. Elle attend derrière un chantier de démolitions que les frontons s’élèvent en France.

Massouard n’a jamais su qu’il voyait trop grand. Son rêve l’aveugle. Il prétend que la proportion n’existe pas. On se met au