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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/153

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tion de sa forme sur la rampe d’un théâtre improvisé. Une jeune fille, une artiste, cela se devinait rien qu’à la manière dont elle était vêtue : un peplum de laine blanche, une robe pauvre, cependant si gracieuse, s’asseyait près de la harpe sur un X de velours vert, et de chaque côté de la jeune fille deux petits garçonnets joufflus et bouclés, un brun et un blond, se tenaient respectueux, — deux anges devant la madone, — portant de mignons tambourins. Il y avait un piano qu’on ne voyait pas. Éliante ayant condamné depuis longtemps l’effet désastreux que produit la présence officielle de cette boîte à ligne droite et lourdes comme celles d’un buffet de gare.

— Ce qu’elle s’y entend aux fêtes de l’innocence ! songeait Léon, émerveillé par l’art exquis s’épandant sur les moindres détails.

Et quand il lui tombait, du plafond d’algérienne, une de ces perles fines, après lesquelles couraient les jeunes danseuses, il tressaillait malgré lui, comme si ses cheveux se mouillaient d’une larme.

Un domestique, en livrée de satin blanc, ce qui le faisait paraître un fort grand seigneur au milieu des autres hommes en habit noir, vint placer des chaises, préparer le demi-cercle, face au théâtre.