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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/18

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Il n’irait pas loin, car il savait qu’elle possédait sa voiture, un coupé bas, petite boîte sombre où le joujou scintillant s’évanouissait, rentrait brusquement, éteignait ses lueurs magiques. Et cela l’exaspérait depuis longtemps.

Elle était toujours en noir : une femme sérieuse.

Elle avait une voiture discrète : une femme riche.

Mais elle déployait, à la fin de ces monotones soirées officielles, une écharpe violente, une écharpe d’aventurière, comme le feu d’artifice d’une joie triomphale. Il se sentait éperdument entraîné vers une conquête peut-être possible, sinon facile, puis, elle filait au grand trot d’un grand diable de cheval, un cheval de légende.

Il n’ignorait pas son nom, ni son adresse. Elle s’appelait Mme Donalger, habitait une vieille maison dans un quartier neuf, du côté du Trocadéro.

Il savait aussi son prénom : Éliante. Il le trouvait bien ridicule.

… Et charmant !

On l’avait présenté le soir même. Un Monsieur quelconque bredouillant :

— Vous devriez conduire Madame au buffet. Elle désire ne pas y aller seule.