Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/213

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— Écoutez-moi, continua-t-elle doucement, je sais bien que ce n’est pas votre faute. C’est fatal, prévu de toute éternité. Mais l’amour d’une jeune fille est toujours une chose très respectable, et l’on doit faire son possible pour éviter les complications. Missie vous aime et elle me l’a dit. Le coup de foudre ! Vous pensez bien que, si je prends sur moi de venir vous le répéter, c’est que j’espère une bonne solution. Vous êtes libre de vous retirer, bien entendu ; cependant vous n’avez pas le droit de vous soustraire aux explications d’usage.

— Ah ! Madame, rugit Léon, serrant les poings, je vous défends de toucher à ma liberté, j’en suis seul responsable. Je vous écoute parce que je suis poli, voilà tout !

Éliante leva les paupières.

Ses yeux étaient profonds comme des gouffres, sans une lueur. Elle avait dû pleurer elle-même avant d’arriver jusque-là, mais elle ne verserait pas une larme devant lui, on le sentait à la noirceur du regard.

— Monsieur, dit-elle froidement, je suis chez vous.

Elle n’eût pas dit plus fièrement : je suis chez moi.

— Madame, murmura Léon détournant la tête pour ne plus constater la présence de l’étran-