Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/122

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Mary, soudain enthousiasmée, lui mit ses bras autour des épaules et l’embrassa.

— Je t’apporte des brioches, du sucre d’orge, une bille de verre bleu, oh ! tu vas rire, tiens !…

Et elle tira de ses poches les objets annoncés.

— Mon petit Siroco !… es-tu content ? demanda-t-elle en se pendant à son cou avec un frisson de chatte heureuse.

Siroco était si content qu’il fit une grimace étonnante, se bouleversant le visage comme le savent faire les clowns.

Mary éclata d’un rire fou. On aurait dit qu’en mettant les pieds dans ce jardin, tout devenait pour elle sujet de gaieté ; elle qui ne riait presque jamais riait aux éclats.

— Allons, les enfants, bougonna un vieil homme apparaissant derrière un massif, venez donc voir le fameux spectacle attendu depuis si longtemps, notre Émotion s’épanouit ce matin.

Sur les pointes, comme ayant peur de réveiller quelqu’un, les enfants le suivirent, la main dans la main, l’œil luisant de curiosité. Siroco mangeait la brioche, Mary tenait son chien par le collier.

Le père Brifaut avait bien soixante-dix ans, tout ratatiné, la barbe en broussaille, il portait une veste de laine décolorée par les averses ; son regard, très noyé, exprimait une béatitude quasi céleste, il rêvait d’on ne savait quoi en vous parlant, et haussait tout à coup les sourcils d’un air de visionnaire.

Il amena les enfants devant une corbeille de ro-