Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/132

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— Ça dépend, si c’est possible, je veux bien… Si ce n’est pas possible, tu ne pleureras pas, dis ?

— Eh bien !… je voudrais la rose qu’a fabriquée ton patron, celle de la corbeille, voilà !

Siroco étouffa un cri de stupeur, joignant les mains.

— L’Émotion ?… Tu veux que je coupe la dernière greffe de M. Brifaut ? Tu es folle, Mary !… Il me tuerait !

— Elle n’est point si belle, sa rose, à ton patron, une pauvre petite rose chiffonnée, ni blanche ni jaune… Et puis je la lui payerais, tiens ! j’ai des sous dans ma poche.

— Mary, tu es une sotte, déclara nettement le petit jardinier ; car, devant une telle proposition, il oubliait qu’elle était la fille du colonel.

— Tu es un impoli ! répéta Mary furieuse.

— Écoute, je te donnerai un empereur du Maroc, une grosse rouge, il y en a quatre de celles-là… il ne verra pas la place, ou je dirai que le limaçon l’a mangée.

— Non, je veux l’autre ! se récria Mary, s’entêtant de plus en plus, devenue femme et arrogante, dans son désir de faire commettre une sottise au petit homme qu’elle tyrannisait.

— Mary, tu n’es pas raisonnable… M. Brifaut me chasserait et je gagne mon pain ici, je ne suis pas une jolie demoiselle, je n’ai pas de papa colonel d’un beau régiment… Ce n’est guère gentil de me tirer la langue.