Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/222

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cheveux. Son nez se détachait davantage, ses yeux bleus avaient pris un reflet métallique singulier et sa bouche, plus dédaigneuse, tranchait très rouge sur la chaude pâleur de son teint mat. Il y avait déjà de la panthère dans ses allures de grande fille indomptée ; elle parlait d’un ton bref et hautain qui désespérait les gens ; quand elle allongeait la main on se demandait si des griffes ne dépasseraient pas les doigts et rien ne demeurait moins calme que son humeur. Les attendrissements du bourgogne ne prenaient pas sur sa nature sauvage ; elle désespérait Tulotte qui ne se reconnaissait pas du tout dans sa nièce.

La question du costume fut agitée le lendemain en conseil militaire. Pour la fille du colonel ils étaient d’avis de faire largement les choses. On écrivit même à un couturier de Paris en lui envoyant des mesures. Le génie de la guerre, après maints orages, se décréta comme il suit : une robe de soie violette et blanche, une cuirasse d’argent rehaussé de verroteries éclatantes, un casque d’argent serti de petits aigles d’or ; le sceptre serait une lance effilée. Les détails de ce costume se trouvèrent, par hasard. indiqués dans le journal de la localité, ce qui rendit Mary assez fière.

Les manœuvres préparatoires du carrousel marchèrent d’un train d’enfer ; on se donnait un mal de chien pour se procurer tous les accessoires ; il y aurait des têtes de turc à figures grotesques, des oriflammes de soie rose, des gradins à crépines et des