Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/289

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il s’arrêta brusquement secoué de sanglots pitoyables. Oh ! c’était un martyre que de savoir qu’elle le méprisait au point de ne pas lui avoir tendu son front d’épousée en ce jour solennel. Pourtant, que demanderait-il de plus ? Il lui avait donné, par contrat, la moitié de sa fortune, trois cent mille francs, son hôtel avec la seule charge d’y laisser Tulotte à sa mort et la permission d’agir publiquement à sa guise chez lui. Certes, il se reconnaissait coupable, mais il avait si longtemps expié une seconde d’égarement, qu’il espérait enfin le repos, il se remettrait à ses chères études, il soignerait le protégé du baron pour se distraire, ce paysan qui travaillait comme un forçat pour tâcher de paraître moins ridicule. Ce serait bon de se dévouer encore, mais pour un homme, sans les dangers effroyables que l’on risque auprès de ces femmes décevantes. Oublier ? non, mais effacer et se réhabiliter par la fin de sa vie cachée, pénitente.

Adieu toutes les gloires, toutes les brillantes discussions. À quoi tout cela sert-il quand on n’a pas su se défendre d’un désir sensuel ? Et ensuite il s’éteindrait tranquille en bénissant le petit enfant qui naîtrait d’elle…

— Monsieur, disait Mary, debout au milieu de leur chambre nuptiale et détachant son voile de tulle, une jeune fille élevée par un militaire, formée par un médecin, en sait plus long qu’une vieille femme ; je me dispenserai donc de rougir ou de me sauver, comme doivent le faire, à ma place, les de-