Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/326

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et profiter d’un bien être que son titre de baron payait en satisfactions illusoires. Un étudiant vit aux crochets de ses amis, quand il n’est ni baron ni époux… et comme il ne serait point l’amant, qu’il l’avait deviné dans ses longues insomnies de malheureux rêvant des caresses, il pleurait en se répétant qu’il faudrait la quitter pour la rue, pour le désespoir.

— Madame la baronne, dit-il, la voyant s’asseoir audacieusement sur son lit, je vais mieux, ne m’insultez pas, je m’en irai demain ; je comprends que ma présence vous pèse. Écoutez ! j’ai refusé ma huitième inscription. Je ne crois plus au remboursement par mon travail. Devenir médecin, c’est bon pour les gens très élégants. Vous avez entendu votre mari, il prétend que je suis un imbécile et que je me tiendrai mal dans le monde. À votre dernier bal j’ai cassé une tasse du Japon. Votre oncle a fait semblant de ne pas voir, votre mari m’a secoué le bras, furieux. Or, je ne veux plus qu’il me touche, je lui sauterais dessus. J’irai, dès que je serai solide, m’embaucher sur les quais pour décharger les bateaux ; un rustre a toujours cette ressource… Il finirait par me reprocher ses bontés. Songez, Mary, que j’en mourrais, moi qui vous aime encore…

Il lui expliquait d’un ton amer ces choses et il avait, en même temps, le désir d’embrasser sa main perdue dans les plis du drap. Elle était venue, il pouvait crever à présent : sa joie de partir serait complète.