Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/88

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apprit son catéchisme sans aller encore le lui expliquer.

— Qui est-ce qui t’a dit d’avoir peur de l’enfer ? interrogea sévèrement le colonel Barbe.

— Dis ! et tâche de ne pas mentir ! ajouta Tulotte exaspérée.

— Je ne mens jamais, murmura Mary confuse, et puis ça m’est bien égal. C’est la dame d’en haut, qui m’a fait monter chez elle pour me questionner sur l’histoire sainte. Elle m’a raconté un conte où il y avait des diables, des chaudières, des flammes… elle dit que les petites filles qui ne se confessent pas à huit ans vont dans les chaudières. Moi je me suis mise à rire, alors elle m’a promis de me faire voir tout ça à l’église.

Le colonel Barbe aurait cassé la carafe qu’il tenait si tout d’un coup Caroline n’avait pas déclaré que l’église pouvait être bonne à certaines heures. Si elle se trouvait mieux le lendemain elle irait avec Estelle et Mary.

Le colonel Barbe sortit pour ne pas éclater. Tulotte clignait des paupières.

— Nous y voilà ! pensait-elle, c’est la fin de la fin !

À cette époque un grand événement eut lieu dans la vie de Mary : sa chatte fit des petits. Elle trouva un jour tout un tas de jeunes chats grouillant sur son lit à baldaquin. Tulotte voulait jeter à l’eau cette engeance du plus beau jaune, mais Mary faillit avoir une attaque de nerfs, on dut en choisir deux pour la calmer et les laisser à la mère.