Page:Rachilde - La Tour d’amour, 1916.djvu/205

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l’océan furieux et toujours soulevé comme un sein de femme enragée d’amour.

Je laissai passer mon tour de congé, cette quinzaine-là.

Je n’avais même plus envie d’aller chercher ma gamine de Brest, et cette fille que je croyais ma fiancée la semaine d’avant me parut, de loin, une farce de mon imagination.

J’aurais dû persévérer dans mes bonnes résolutions de mariage. C’était ça le salut… mais quelque chose d’inexplicable s’emparait de moi. Un vertige, le délire du vent, ou l’appétit du chagrin. Je me sentais si malheureux, si triste, que je souhaitais l’être davantage.

Et puis, faut bien l’avouer… Le vieux l’avait-il pas prédit… je ne portais déjà plus de chemise pour être plus près de ma peau…

… Ô phare d’Ar-Men ! Ô maison d’amour, douce maison, effroyable geôle, berceau de toutes les hontes, caves d’où monte le vin troublant des ivresses solitaires, douce maison secourable aux naufragés des mers perfides, vérité de