Page:Rachilde - La Tour d’amour, 1916.djvu/93

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presque comblés, vers midi, la marée enflant et recouvrant une partie de la bâtisse inférieure. Seulement on pouvait longer le pied du phare en bateau. Je détachai le canot, prêt à être lancé selon le règlement, un vieux canot radoubé, mal fichu, pas capable de tenir sur la houle, et je le menai à la force du poignet, me serrant contre la muraille en halant le long d’une rampe de fer. Ces précautions n’étaient pas inutiles, car le courant bouleversait toutes les manœuvres ordinaires.

Ce courant-là venait juste de la Baie des Trépassés. Le phare se trouvait au milieu d’un remous formé par le raz de Sein et les dernières îles ou îlots de la grande Chaussée. Il avait l’aspect, vu sur les cartes, d’un petit bonhomme debout au fond d’une cuvette, et on sait que, lorsque l’eau tourne autour d’un point, elle y amasse des quantités de choses.

D’ailleurs tout tourne autour de ces deux énormes piles de pont qui sont la queue de Bretagne et la queue de Cornouailles. À chaque