Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/111

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Celui-là n’était pas plus séduisant, mais il était jeune et possédait l’attrait du mystère. On pourrait comploter une mise en scène : se rendre intéressante par une feinte terreur, dire des choses en a parte, tirer le ministre à elle derrière une portière ou dans le jardin, côté des roses, se présenter comme cela, de profil, et elle se repenchait sur son miroir, l’œil agrandi par une sorte d’épouvante mal dissimulée, murmurer, les dents claquant un peu, le souffle court, le corsage agité par une palpitation : « Monsieur le Ministre, mon père ne vous a pas dit… Moi, je crois de mon devoir… si vraiment cet homme est dangereux, s’il venait pour encore une bombe ou un coup de poignard ? Vous êtes un grand personnage (gros surtout !), notre hôte sacré (là, elle chercherait le mot gentil, la phrase touchante)… Enfin, monsieur le Ministre, je vous confie mon embarras, nous avons ici un anarchiste, et depuis que je vous ai vu je ne songe qu’à ce danger possible. » Ce serait bien le diable si ce ministre garçon ne s’apercevrait pas, au moment même de l’imaginaire danger à lui révélé, de la beauté plus que réelle de la révélatrice… et alors… Elle avait bien juré à l’anarchiste qu’elle ne le dénoncerait pas, mais ses