Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

garnison allaient souper avec des filles, et les servantes s’écriaient, pudibondes :

— Voilà un oiseau de malheur parti ! Bon voyage ! Nous n’irons bien sûr pas fouiller son nid pour y trouver de la vermine.

Le vieux Jacqueloir et Gaufroi le rimeur se renfermaient en un prudent mutisme, tout en échangeant quelques signes d’intelligence. Du moment qu’il s’agissait d’histoire de femmes, ils pensaient qu’il valait mieux ne pas déranger l’oiseau funèbre. Enfin, on ne savait rien, ni elles, ni eux, ni personne, et cela n’avait pas la moindre importance ; un vagabond arrive, on lui fait l’aumône, il s’en va, on ne lui doit plus que l’oubli.

L’oubli ! Marguerite Davenel tournait lentement, colombe malade, autour de sa cage, de sa chambre virginale où tout était pur, les rideaux de mousseline, les tapis de toisons pascales, les petits ronds au crochet, toiles d’araignées blanches veuves de leur mouche. Que faire ? Elle était prisonnière dans sa dignité de fille vertueuse. Une phrase, une démarche imprudentes, et elle découvrait l’odieux mystère d’une liaison avec un bandit sans foi ni loi qui s’amuserait à renier publiquement ses aveux si la fantaisie