Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/247

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Parmi des ronces rampantes et des vignes maigres, elle remarqua des touffes de violettes fraîchement plantées, d’humbles violettes des bois pâlottes à cause de l’ombre et, près d’elles, une petite cruche fêlée pour les arroser, mais les fleurs n’auraient bientôt plus besoin d’eau, car elles séchaient sur leurs tiges, ce n’était plus pour les fleurettes pauvres la saison du triomphant parfum.

Marguerite heurta du manche de son ombrelle la porte disjointe de la maison, sans nul doute abandonnée.

Ce fut la sœur qui vint lui ouvrir.

Et les deux femmes demeurèrent en présence, immobiles, effarées toutes les deux de s’apercevoir autrement qu’elles s’étaient rêvées.

Flora portait toujours sa robe rose ignoblement crasseuse, sans corset, mal coiffée, ses cheveux roux, d’un roux presque noir, ou teintés de suie, lui embrouillaient les traits, une mèche lui galopant sur toute la face. Son corsage déboutonné, car elle aussi avait chaud, laissait entrevoir la cicatrice de sa gorge. Elle tenait à la main une veste d’homme qu’elle brossait ou reprisait. Ses doigts semblaient si minces qu’on aurait eu peur de les briser en les serrant ; elle se traînait,