Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/42

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Depuis dix ans qu’ils habitaient Flachère, on avait vu bien des chemineaux récalcitrants, bien des ouvriers saouls, bien des voleurs venant vous vomir à la face leur indigestion de fruits ou leurs menaces de vous en dérober d’autres. Point ne s’était encore trouvé, sur les routes franchement égalitaires de leur gouvernement, un fou de cette espèce.

M. Davenel battait des paupières.

Marguerite ouvrait les bras, témoignant de sa complète ignorance. Tous deux se rapprochèrent. La fille posa sa main sur le poignet du père, désirant ne pas l’abandonner dans une pareille extrémité.

— J’ai eu tort de t’amener ce Monsieur, chuchota-t-elle, confuse.

Davenel dit, tout haut, sentencieusement :

— On n’a jamais tort de chercher à faire le bien, ma fille.

L’épouvantail, qui broyait entre ses deux solides mâchoires les derniers morceaux du poulet, grommela :

— Moi, je suis de l’avis de Mademoiselle votre fille. Elle a eu tort. Il faut toujours laisser les voleurs à leur place, c’est-à-dire dans leur misère… qui est la liberté.