Page:Rachilde - Le Dessous, 1904.djvu/58

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jadis de drap fin et de coupe anglaise, se confondaient à présent avec le hâle de sa peau. Il aurait bientôt plus de trous que de taches et toutes ses misères s’égaliseraient sous le même vent de malheur. Son chapeau de feutre mou pleurait des larmes de deuil le long de son dos, lui plaquant ses cheveux aux tempes, et il s’essuyait d’un geste machinal en se barbouillant de noir quand cela lui glissait dans les yeux.

Lorsqu’il eut rencontré la cabane, il se sentit capable de dormir des années, il était dominé par le sommeil invincible qui s’empare de ceux qui n’ont plus l’espoir du lendemain. Il allait se vautrer là, en animal désormais tranquille, abdiquant sa dignité de personnage pensant, et, couché de tout son long sur une litière presque pourrie, un fumier de feuilles, il avait dormi profondément, sans un rêve appréciable. À son réveil, la vision morne de ce pays raviné par une pluie tenace lui semblait un cauchemar ; il devinait des choses plus mornes encore dans les dessous de ce spectacle correctement effrayant, et il demeurait immobile, étendu, le menton sur ses deux poings, écoutant le floc floc de l’eau qui agrandissait ironiquement toutes les flaques. L’homme ne songeait pas à réagir, ne s’éton-