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Page:Rachilde - Le Grand saigneur, 1922.djvu/15

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grise. Ses mains longues et maigres ont des doigts souples, aux ongles très soignés, qui démentent l’expression sauvage de la bouche.

— Vous avez froid, n’est-ce pas ? demande Marie Faneau en l’examinant comme si elle le voyait pour la première fois, car un homme vivant, quand revient la vie, n’est plus du tout le modèle qu’on étudiait.

— J’avoue ! fait laconiquement l’homme qui ne cache pas son ennui d’être surpris en état d’infériorité.

— Je suis désolée, cher monsieur. J’aurais bien dû m’en apercevoir plus tôt.

Maintenant le feu flambe dans la cheminée. Marie Faneau a poussé, près de lui, une table turque et, sur cette table, les traditionnels ustensiles : théière, tasses et petits fours.

— Vous n’avez pas le chauffage central ? questionne le Monsieur pour dire quelque chose.

Marie Faneau se met à rire.

— Non. Nous sommes ici dans une maison qui date de Philippe-Auguste, au moins pour ses fondations, et il paraît qu’elle ne saurait se plier au confort moderne sans être entièrement démolie. D’ailleurs, mon frère ne s’occupe jamais de notre intérieur. Il n’a jamais le temps.