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Page:Rachilde - Le Grand saigneur, 1922.djvu/32

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table octogone où le frère corrige des dessins, tire des plans pour ses réductions de portraits.

Michel Faneau est graveur. Il a du talent, plus de talent que de métier. C’est un très mauvais sujet, assagi, que Marie Faneau a sauvé des pires situations en lui payant d’abord ses dettes, et en lui imposant, ensuite, son patient amour du travail. De quelques années plus jeune qu’elle, Michel est en homme ce qu’elle est en femme, une figure séduisante, seulement il est blond au lieu d’être roux. Ce sont deux épreuves du même cliché, dont la seconde est plus floue, moins bien venue. Il serait fort joli garçon s’il n’avait pas cet air tourmenté, souffrant, cette perpétuelle gaîté factice qui fatigue comme l’obsession d’un refrain trop entendu. Est-il tuberculeux ou simplement névrosé, malade physiquement ou moralement ? On n’en sait trop rien, car il a un appétit d’enfer, boit beaucoup, parle sans cesse et ne se soigne guère, aimant à risquer toutes les imprudences qui lui sont possibles.

D’une instruction et d’une éducation réelles, il affecte d’ignorer le français en se servant d’un langage vulgaire pour dire des choses toujours regrettables. Sous le spécieux prétexte que sa