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Page:Rachilde - Le Grand saigneur, 1922.djvu/35

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amis devant un commun danger et retrouvent toujours le même goût pour leur intelligence, quand il s’agit de tout concilier. Marie Faneau, pour réagir contre les faiblesses de son cadet, reprend toujours possession de sa force d’artiste généreuse, parce qu’elle a confiance en elle et que cela lui suffit pour avoir, dans une certaine mesure, confiance en lui.

Très jeunes, ils ont perdu leurs parents, un couple de demi-fous. Elle, Marie, l’aînée, déjà presque consacrée par l’opinion des critiques d’art, s’est jetée dans le travail comme on se jetterait à la mer pour sauver l’enfant qui se noie, le pauvre petit cadet, élève d’un cher maître libertin. Elle l’a ramené au rivage et, maintenant, elle ne va pas s’attarder aux détails de ce sauvetage hardi : s’il a rapporté de la vase d’on ne sait quel bas fond social, elle le couvre de son manteau de reine assez ample pour tout cacher. Puis elle se souvient du père alcoolique, de la mère, hantée d’une sombre jalousie, que Michel n’a pas pu bien connaître et qui sont les responsables de ce caractère indécis dans la bonne comme dans la mauvaise conduite. Une sincère pitié l’émeut en songeant qu’elle a hérité d’eux pour tout ce qu’ils pou-