Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/287

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cet homme pénétra par le verger derrière les cloîtres et entra simplement chez Chrodielde en demandant à boire. Il était grand, large d’épaules, brun comme l’ours dont il portait la dépouille, parlait un langage effroyablement licencieux et riait lui-même à perdre haleine de ce qu’il racontait.

Chrodielde, très fière de cette nouvelle recrue, car Childéric était de noble origine, l’accueillit de la meilleure façon.

Ragna le trouva joyeux compagnon devant les outres.

Harog s’en défia et le tint à distance.

Basine l’exécra aussitôt pour sa dévotion envers Chrodielde.

Les deux cousines se traitaient maintenant en ennemies, se reprochant mutuellement leur orgueil et surtout leur secret désir de domination sur les hommes qu’elles commandaient, chacune jalouse de l’autre. Chrodielde ne savait plus distinguer ses favoris nocturnes, confondant souvent leur titre, appelant Brodulphe-le-Boucher et Boson-l’Adultère tandis que Ragna, aveuglé par sa passion grandissante, ne comprenait point pourquoi elle lui semblait si fatiguée en de certaines circonstances où c’était son tour de faveur. Mais Basine, farouchement chaste, résistait toujours aux ferventes solli-