Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/237

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Elle se dégagea de son étreinte.

— Ce n’était pas un homme, lui, mon amant ! bégaya-t-elle, puis elle se trouva sur ses pieds, à la grille du jardin de Marcelle, ne comprenant plus du tout.

— Louis… j’ai du sang après moi, j’ai du sang… Oh ! je veux m’en aller… m’en aller avec toi. Louis ! j’ai peur de mourir là.

Ils franchirent la grille. Louis l’enlaça de son bras vigoureux.

— Fuyons, dit-il, je ne regrette pas ce que j’ai fait… mais que le ciel nous protège, car nous sortons d’un abîme !

…Marcelle Désambres agonisait, elle avait trouvé la force de se traîner sur les pas des fugitifs ; elle atteignit le seuil du boudoir, là elle ramassa un poignard tout rouge qui lui piquait le genou… Une dernière volonté farouche la conservait encore vivante, elle espérait qu’ils n’avaient pas reconnu son sexe et elle voulait aller s’ensevelir dans la Loire : le fleuve qui laverait sa honte, et peut-être ne la rendrait pas au mépris public.

— Je veux ! hurla-t-elle, faisant un effort surhumain.

Elle dut s’arrêter au milieu de la terrasse, en se traînant, elle avait perdu beaucoup de sang, la vie s’échappait à grands flots de sa gorge déchirée.

— Oh ! la brute ! cet homme ! fit-elle, il m’a manquée, il faudra que je m’achève ! pauvre Louise !… ma belle et douce création d’amour ! Comme cela fait mal tout de même, de mourir… Louise… Louis… mes deux bourreaux… je ne vous reverrai pas… Oh ! la nuit !… le froid !