Page:Rachilde - Monsieur Venus, Brossier, 1889.djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
xiii
préface

des lèvres minces, d’un dessin assez désagréable. Dans l’atelier de sa fleuriste, elle remarque un jeune ouvrier. Couronné des roses qu’il tortille lestement en guirlande, ce garçon d’un roux très foncé, l’enchante par son menton à fossette, sa chair unie et enfantine, et le petit pli qu’il a au cou, le pli du nouveau-né qui engraisse ; et puis il regarde, comme implorent les chiens souffrants, avec une vague humidité dans les prunelles. Tout le portrait est de ce ton excellent, vraiment canaille et nature. Raoule installe dans un intérieur fort romanesque ce joli garçon si gras ; elle le surprend qui, fou d’une folie de fiancée en présence de son trousseau de femme, lèche jusqu’aux roulettes des meubles à travers leurs franges multicolores. Avec un cynisme de très spirituelle allure, elle le déconcerte quand il imagine d’être aimable ; elle le pousse dans un cabinet de toilette, elle le fait rougir par son audace à l’examiner et le complimenter, lui le rustre