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Page:Rachilde - Monsieur Venus, Brossier, 1889.djvu/69

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monsieur vénus

cette impertinence d’un corps paraissant s’ignorer n’en était que plus piquante. Le talon, cambré, ne portait que sur un point imperceptible, tant il était rond.

Les deux coudes des bras allongés avaient deux trous roses. Entre la coupure de l’aisselle, et beaucoup plus bas que cette coupure, dépassaient quelques frisons d’or s’ébouriffant. Jacques Silvert disait vrai, il en avait partout. Il se serait trompé, par exemple, en jurant que cela seul témoignait de sa virilité.

Mlle de Vénérande recula jusqu’au lit ; ses mains nerveuses se crispèrent dans les draps ; elle grondait comme grondent les panthères que vient de fustiger la souple cravache du dompteur :

— Poème effrayant de la nudité humaine, t’ai-je donc enfin compris, moi qui tremble pour la première fois en essayant de te lire avec des yeux blasés. L’homme ! voilà l’homme ! Non Socrate et la grandeur de la sagesse, non le Christ et la majesté du dévouement, non Raphaël et le rayonnement du génie, mais un pauvre dépouillé de ses haillons, mais l’épiderme d’un ma-