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L’espoir de Renée était bien fou, mais elle avait espéré, jusque-là…, elle laissa tomber sa figure dans ses mains fiévreuses.

— Alors elles sont brûlées ?

— Oui », répondit la femme du pharmacien avec un frisson.

Elle mentait. Le matin encore, après la recommandation de son mari, elle avait relu ces pages naïves et longtemps elle s’était demandé pourquoi Nono lui écrivait, une nuit, cette phrase bizarre : « Le temps est superbe, je suis seul et je pleure, ma Lilie. Ce château que j’habite est plein de mystères qui augmentent mon ennui. Sous ma fenêtre, je viens de voir passer, courant comme en délire, Mlle Renée Fayor… je ne puis voir une femme dans un jardin lorsque brillent les étoiles, sans songer que ce n’est pas toi…, et je pleure. » La lettre était datée de la date même assignée par les journaux à la nuit du crime.

— Prenons garde aux démêlés ! avait décidé le sage M. Chauvol. Lilie enceinte y prenait garde plus que personne.

— Oui, toutes brûlées, appuya-t-elle une seconde fois, et, malgré son émotion, elle examinait, de ces regards curieux qu’ont seules les provinciales, les malines merveilleuses garnissant la robe de chambre de la duchesse.

— Il ne me reste plus qu’à vous supplier de parler ! murmura Renée debout, le front baissé devant la petite bourgeoise.

— Parler ! pourquoi ? je ne me souviens guère de