Page:Racine - Œuvres, t4, éd. Mesnard, 1865.djvu/336

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leur orgueil par la citation d’un passage mal entendu, s’il vous arrivoit de vous y méprendre ; et ils vous déshonoreroient charitablement devant les hommes, si sachant qui vous êtes, votre conduite leur donnoit sujet d’en médire. Mais n’étant rien de tout ce qui mérite un reproche, comment tenir contre vous ?

En vérité, Monsieur, je ne vois pour eux qu’un réduit, dans lequel ils ne manqueront pas de se cantonner. Vous déclarez en vouloir moins croire à leur parole sur le sujet des cinq Propositions qu’au pape et aux évêques : vous voilà engagé dans la querelle du fait ; ils vous répondront ce qu’ils disent aux autres ; et quelque dégoût que vous témoigniez avoir de l’histoire d’Honorius, vous n’en pouvez encore éviter la redite.

Je les estimerois heureux si cette histoire pouvoit donner atteinte à celle des capucins, qui les met si fort en cervelle ; mais je ne crois pas qu’elle puisse aller là, non plus que d’absoudre les jansénistes d’avoir été admirateurs et passionnés du roman de Mlle de Scudéry. Je doute même que tous les Pères et l’histoire de l’Église leur puissent servir d’asile pour éviter le blâme dû à l’hypocrisie.

Peut-être qu’ils se récompenseront en soulevant contre vous les anachorètes pour soutenir la pénitence de feu M. le Maistre, et qu’ils vous feront voir par des raisons recherchées qu’il a dû quitter le barreau pour laver les écuelles.

Mais pourquoi se servir de ces exemples ? Si les misères que souffre des Marets vous donnent le même préjugé de conversion que les bassesses de M. le Maistre, est-ce à dire que vous blâmez M. le Maistre ? et en peut-on inférer autre chose, sinon que l’on ne doit pas disputer à des Marets la qualité de pénitent ?

De tout ceci. Monsieur, que conclure ? Si j’étois janséniste, je conseillerois mes confrères de passer condamnation de tous les endroits de leurs écrits qui choquent les faiseurs de romans et de comédies ; et sans vous obliger à faire honneur à leur traduction de Térence, et à tout ce que vous critiquez qui vient d’eux, je croirois beaucoup faire pour le parti, que d’obtenir de vous une neutralité qui vous fit taire.

Je suis, Monsieur, votre, etc.

Ce 30 avril 1666.