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Page:Racine - Œuvres, tome 1, 1679.djvu/126

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Axiane
Quoi ? Porus…

Taxile
C’en est fait. et sa valeur trompée
Des maux que j’ai prévus se voit enveloppée.
Ce n’est pas (car mon cœur, respectant sa vertu,
N’accable point encore un rival abattu),
Ce n’est point que son bras, disputant la victoire,
N’en ait aux ennemis ensanglanté la gloire ;
Qu’elle-même, attachée à ses faits éclatants,
Entre Alexandre et lui n’ait douté quelque temps ;
Mais enfin contre moi sa vaillance irritée
Avec trop de chaleur s’était précipitée.
J’ai vu ses bataillons rompus et renversés,
Vos soldats en désordre et les siens dispersés,
Et lui-même, à la fin, entraîné dans leur fuite,
Malgré lui du vainqueur éviter la poursuite,
Et de son vain courroux trop tard désabusé,
Souhaiter le secours qu’il avait refusé.

Axiane
Qu’il avait refusé ! Quoi donc ? pour ta patrie,
Ton indigne courage attend que l’on te prie ?
Il faut donc, malgré toi, te traîner aux combats,
Et te forcer toi-même à sauver tes États !
L’exemple de Porus, puisqu’il faut qu’on t’y porte,
Dis-moi, n’était-ce pas une voix assez forte ?
Ce héros en péril, ta maîtresse en danger,
Tout l’État périssant n’a pu t’encourager !
Va, tu sers bien le maître à qui ta sœur te donne.
Achève, et fais de moi ce que sa haine ordonne.
Garde à tous les vaincus un traitement égal,
Enchaîne ta maîtresse en livrant ton rival.
Aussi bien c’en est fait : sa disgrâce et ton crime
Ont placé dans mon cœur ce héros magnanime.
Je l’adore, et je veux avant la fin du jour