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Page:Racine - Œuvres, tome 1, 1679.djvu/289

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SCENE IV.

AGRIPPINE, ALBINE.

ALBINE.

DAns quel emportemẽt la douleur vous engage,
Madame ! L’Empereur puiſſe-t-il l’ignorer !

AGRIPPINE.

Ah luy-meſme à mes yeux puiſſe-t-il ſe monſtrer !

ALBINE.

Madame, au nom des Dieux, cachez voſtre colere.
Quoy pour les intereſts de la Sœur ou du Frere

Faut-il ſacrifier le repos de vos jours ?
Contraindrez-vous Ceſar juſques dans ſes amours ?

AGRIPPINE.

Quoy tu ne vois donc pas juſqu’où l’on me ravale,
Albine ? C’eſt à moy qu’on donne une Rivale.
Bien-toſt ſi je ne romps ce funeſte lien,
Ma place eſt occupée, & je ne ſuis plus rien.
Juſqu’icy d’un vain titre Octavie honorée
Inutile à la Cour, en eſtoit ignorée.
Les graces, les honneurs par moy ſeule verſez
M’attiroient des mortels les vœux intereſſez.
Une autre de Ceſar a ſurpris la tendreſſe,
Elle aura le pouvoir d’Eſpouſe & de Maiſtreſſe,
Le fruit de tant de ſoins, la pompe des Ceſars,
Tout deviendra le prix d’un ſeul de ſes regards.