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TRAGÉDIE. 335

Je fcrvois à regret Ces dcflcins amouieux ;

Mais le fort irrité nous aveugloit tous deux.

Le tyran m'a fijrpris fans défenfc & fans armes.

J'ai vu Piritholis , trifte objet de mes larmes ,

Livré par ce barbare à des monftrcs cruels ,

Qu'il nourrilFoit du fang dus malheureux morrelst

Moi-même, il m'enferma dans des cavernes fombres ,

Lieux profonds & voifins de l'empire des ombres.

Les dieux , après lîx mois, enfin m'ont regardé.

J'ai fu tromper les yeux par qui j'écois gardé.

D'un perfide ennemi j'ai purgé la nature.

A fcs monftres lui-même a fervi de pâture.

Et lorfqu'avec tranfport je penfe m'approcher

De tout ce que les Dieux m'ont laillé de plus cher ;

Que dis-je ? Quand mon amc , à foi-même rendue ,

Vient fe raiFaficr d'une fi chère vue ;

Je n'ai pour tout accueil que des frémiflcmens.

Tout fliit , tout fe refufe à mes embrallemens.

Et moi-même , éprouvant la terreur que j'infpirc »

Je voudrois être encor dans les prifons d'Epire.

Parlez. Phèdre fe plaint que je fuis outragé.

Qui m'a trahi ? Pourquoi ne fuis-je pas vengé ?

La Grèce, à qui nion bras fut tant de fois utile ,

A-t-elle au criminel accordé quelque afyle ?

Vous ne répondez point. Mon fils , mon propre fils

Eft-il d'intelligence avec mes ennemis î

Entrons. C'ell trop garder un doute qui m'accable*

Connoiiïbns à la fois le crime Se le coupable.

Que PUcdre explique enfin le trouble où je la voi.

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