Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T1.djvu/62

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la causer. La scène qu’ils avoient sous les yeux, ressemblent, quoique fort en grand, au point-de-rue de la pêcherie que préféroit madame Saint-Aubert. Ils le remarquèrent tous deux, et pensèrent au plaisir qu’elle eût senti en se trouvant dans leur position. Hélas ! ses yeux étoient fermés et ne devoient plus se rouvrir. Saint-Aubert se rappeloit sa dernière promenade avec elle, les tristes présages qui l’accompagnèrent, et leur trop subit accomplissement. Ces souvenirs l’accablèrent ; il se leva brusquement, et s’éloignant un peu, alla dans un coin écarté se livrer sans témoins à sa douleur.

Il revint plus calme, prit la main d’Emilie, et la serra tendrement sans rien dire ; bientôt après il appela son muletier, et lui demanda s’il connoissoit une route dans les montagnes qui pût conduire en Roussillon. Michel lui répondit qu’il y en avoit plusieurs, mais qu’il les connoissoit fort peu. Saint-Aubert, qui ne vouloit voyager que jusqu’au coucher du soleil, demanda le nom de quelque hameau voisin, et s’informa du temps qu’ils mettroient à l’atteindre. Le muletier calcula que l’on pouvoit gagner Mateau ; mais que si l’on vouloit se jeter au sud du côté, du Roussil-