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LE BAL DU COMTE D’ORGEL

— Rentreras-tu dîner ? demanda-t-elle.

François qui n’allait à Paris que pour accompagner les Orgel, mais n’y voulait voir personne, afin qu’aucun visage ne s’interposât entre son bonheur et lui, répondit qu’il reviendrait.

Mais Anne pria Mme de Séryeuse de lui laisser son fils. François le souhaitait, mais n’osait y croire, car les Orgel invitaient rarement à la dernière minute. La reconnaissance de François le fit se féliciter de ressentir un amour qui ne pouvait recevoir aucune réponse, car il mesura le dégoût de tromper un ami comme Anne d’Orgel. Peut-être aurait-il eu moins de beaux scrupules s’il lui eût été donné de suivre, dans la voiture, les pensées qui vinrent à Mme d’Orgel sans qu’elle-même les pût mettre en ordre. Il en est des êtres comme des mers ; chez les uns l’inquiétude est l’état normal ; d’autres sont une Méditerranée, qui ne s’agite que pour

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