Page:Radiguet - Souvenirs, promenades et rêveries, 1856.djvu/37

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Le reste de notre promenade ne nous offrit plus que des incidents d’un intérêt trop relatif pour qu’il nous paraisse convenable de nous y arrêter longuement. — S’enfoncer dans les chemins creux, sous la voûte fraîche et verte des coudriers, longer des haies d’épines où les brindilles vagabondes du chèvrefeuille circulent chargées de pénétrantes senteurs, respirer le doux arome de la fève de Tonquin qui sort des prairies pendant la fenaison, écouter le bruyant caquetage des pies et des geais, tandis qu’un pivert trouble-fête, cognant un tronc d’arbre avec son bec, semble un maître d’école qui rappelle à l’ordre son turbulent entourage, se reposer sur les gazons au pied des grands hêtres, d’où tombent à intervalles réguliers les deux notes invariables d’un coucou qui vous rappelle cette persévérance des nègres à chanter aussi les mêmes syllabes durant des heures entières ; tous ces détails, notés en chemin, ne sont guère particuliers à une promenade dans la campagne bretonne ; aussi n’en poursuivrons-nous pas l’énumération, et conduirons-nous brusquement le lecteur au soir de ce même jour, pour lui mettre sous les yeux une scène plus caractéristique du pays.


III

Revenus à Ploudaniel, nous avions quitté ce bourg après un dîner qui fut à peu près la deuxième édition, légèrement augmentée, de notre premier repas. Quand nous traversâmes Saint-Éloi, la nuit était sombre en dépit des