Aller au contenu

Page:Rague - Jane Austen, 1914.djvu/90

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

est pauvre, il n’a plus d’attraits pour Lucy Steele. Elle a eu le temps, grâce à l’amitié de Mrs. John Dashwood, de nouer connaissance avec son jeune frère Robert, que vient d’enrichir la punition infligée à Edward ; et elle n’a pas plus de peine à l’entortiller qu’elle n’en a eu avec son aîné. Mrs. Ferrars est en train de négocier le remplacement d’Edward par Robert comme fiancé d’une riche héritière, quand elle apprend que sa chère Miss Lucy Steele vient maintenant de lui enlever son fils cadet avec le domaine de Norfolk ; et, cette fois, le mariage est aussi en règle que l’acte de donation.

Edward, libéré de son engagement, accourt auprès d’Elinor ; et sa mère, un peu assagie par l’aventure de Robert, finit par accorder son consentement à leur mariage, avec une rente raisonnable. Dans l’intervalle, après une longue période de désespoir, Marianne oublie Willoughby, et se laisse toucher par la persévérance du colonel Brandon. Mrs Henry Dashwood peut maintenant vivre confortablement avec sa plus jeune fille sur le petit héritage laissé par son mari ; Mr. John Dashwood est définitivement délivré de toute préoccupation au sujet de la promesse faite à son père ; et ses deux beaux-frères sont assez fortunés pour qu’il puisse en parler sans honte.

Si la marche de l’action n’est pas aussi sûre que dans Orgueil et Préventions, si la personnalité des héros est moins originale, les incidents qui nous font connaître l’évolution de leurs sentiments sont encore choisis avec un art heureux et développés avec esprit. La petite scène suivante, ne donne-t-elle pas tout naturellement l’idée la plus nette de la finesse intrigante des sœurs Lucy et Anne Steele, de la franchise d’Elinor, de l’étourderie de Marianne. C’est après un grand dîner chez Mr. John Dashwood.

Quand les dames se retirèrent au salon, la pauvreté de la conversation devint plus sensible ; les hommes y avaient apporté quelque variété : la politique, les affaires, l