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LA GRANDE PEUR

alors jusque sur le seuil de la chambre où on couchait : « Joseph ! eh ! Joseph… »

On n’y voyait déjà plus bien, à cause des petites dimensions de la fenêtre, mais on y voyait tout de même assez pour qu’il ait aperçu Joseph, qui était couché à plat ventre. Qui n’a pas bougé, qui ne bougeait pas, qui a été appelé une fois encore et ne bougeait pas.

— Voyons, viens vers moi, disait Barthélemy, avec moi tu ne risques rien, j’ai le papier, tu sais ; et on se met ensemble.

Mais Joseph n’a pas bougé ; on n’a même pas pu savoir s’il vous avait entendu, ou non ; aucune réponse ne vint de lui, aucun geste ne fut fait par lui, aucun bruit ne s’est élevé de dedans la paille où il se tenait étendu, la figure entre les bras.

Et c’est au même moment que ces appels ont commencé à se faire entendre par une bête, puis encore une bête, et leurs longs meuglements, puis une cloche secouée ; — alors Barthélemy une fois encore : « Eh ! Joseph, » inutilement, après quoi il sort de nouveau.

C’était ce qui restait du troupeau, c’était la petite moitié de troupeau qui restait, — parce qu’on l’avait oubliée. En même temps