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DANS LA MONTAGNE

d’entrer avaient ôté leurs chapeaux, tournant le dos à Clou, en sorte qu’on n’a pas pu voir si Clou ôtait le sien, ou non.

Il y eut toute la sonnerie, puis les trois coups ; après quoi, le bruit des bancs a repris.

Et partout, dans le village, de l’autre côté des carreaux, les bruits avaient repris de même ; puis on a vu les trois hommes s’approcher de Clou : c’était justement le Président accompagné des deux Crittin.

La montée devait avoir lieu le surlendemain 25 juin, jour de Saint-Jean-Baptiste ; et le Président aurait aimé qu’elle eût lieu à la vieille mode, c’est-à-dire qu’elle fût l’occasion d’une grande fête, comme c’est la coutume depuis toujours, dans le pays. Sur ce point, le village se trouvait assez partagé. Beaucoup de gens disaient : « Attendons de voir… On pourra toujours en faire une vraie l’année prochaine, si tout va bien cette année-ci ; » mais le Président tenait à son idée. Depuis plusieurs jours, il intriguait auprès du monde, payant à boire à ceux dont l’opinion comptait ; et, ce soir-là encore, il avait donné rendez-vous à plusieurs personnes, jugeant que l’appui des Crittin ferait de l’effet sur elles. Depuis plu-