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est né de l’analyse des relations sociales, déterminées par la relation du travail et du capital. Son but est la révolution sociale par la classe ouvrière organisée nationalement et internationalement. Le prolétariat est devenu le pivot de cette organisation. L’Internationale a été la première tentative d’une vaste organisation des prolétaires de tous les pays qui a proclamé le principe de l’émancipation des ouvriers par les ouvriers eux-mêmes. L’Internationale a succombé. Mais le programme socialiste reste dans tous les pays civilisés, avec ses bases essentielles et identiques, le point de ralliement des classes ouvrières de tous les pays.

Le plan de l’action socialiste est simple et défini. Il faut organiser le prolétariat en parti de classe, développer sa conscience socialiste. Les autres classes sociales (paysans, petite bourgeoisie, les intellectuels) ne peuvent en tant que classes s’identifier avec le prolétariat et toutes ses revendications, mais leurs intérêts immédiats les poussent souvent dans les rangs du prolétariat. Quant à la classe des capitalistes et des grands propriétaires, il n’y a aucune possibilité de compromis avec elle. On ne pactise pas avec l’ennemi. C’est la révolution sociale, nous l’avons déjà dit, qui délivrera la société de sa domination parasitaire. Tous les programmes minima doivent être subordonnés à ce montent suprême de la lutte sociale.

Quant aux partis politiques qui défendent des revendications socialistes sans en accepter le programme et le but définitif, le devoir du parti socialiste est de ne pas les combattre — provisoirement. Mais le parti socialiste formule ces revendications en son propre nom et les défend à l’aide de ses propres représentants.


XIV

Pierre Lavroff était un partisan absolu de l’unité socialiste la plus complète[1]. Les socialistes doivent toujours se rappeler qu’ils ont à combattre un ennemi redoutable ayant à sa disposition les forces énormes de l’État organisé ; qu’ils ont à se soumettre aux conditions nécessaires de toute guerre, et que la condition principale de celle-ci consiste dans la soumission à un plan unique, dans la discipline, dans l’unité de l’action. Les divisions politiques ont souvent pour cause les rivalités et les ambitions personnelles. Il faut les supprimer dans l’intérêt supérieur de notre cause. Une organisation centraliste s’impose

  1. Il en a donné lui-même un exemple. Lorsque le parti terroriste de la « Volonté du peuple » a su combattre glorieusement le despotisme russe, il a consenti à se mettre dans ses rangs tout en étant en désaccord sur bien des points avec cette organisation révolutionnaire.