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vage de la femme et proclame l’union libre de deux êtres, se basant sur un besoin physiologique légitime, sur l’affection mutuelle et sur la reconnaissance mutuelle de la dignité personnelle de l’homme et de la femme. Leur union doit être justifiée par la science et par le sentiment moral.

La pensée critique, tout en reconnaissant la nécessité de s’assurer des moyens d’existence, combat la propriété-monopole basée sur l’exploitation parce que celle-ci exclut toute possibilité de solidarité entre les hommes en transformant la société en un champ de bataille pour la vie, corrompt les possédants et met dans une situation intolérable la majorité des travailleurs dépossédés. L’évolution économique de la société capitaliste vient en aide à la pensée critique dans son œuvre de destruction des formes traditionnelles et injustes de la propriété.

La pensée critique condamne l’État actuel dans tout ce qu’il a d’oppressif et en tant qu’il présente une organisation d’une minorité possédante pour assurer l’ordre dans l’intérêt de cette minorité, en tant qu’il fait violence à la volonté des hommes qui ne se sont pas soumis librement à son autorité. Ce qui distingue l’État, c’est qu’il représente un contrat accepté par une minorité et obligatoire pour la majorité. La violence contre l’individu libre résulte donc de sa nature même.

Toutes ces formes sociales ont passé par différents stades d’une évolution. Elles étaient conditionnées par des besoins réels. On les a idéalisées, c’est-à-dire entourées d’un respect aveugle. On en a fait des idoles, des institutions inviolables. Le travail de la pensée critique consiste dans le discernement des éléments légitimes de cette « idéalisation ». La pensée critique découvre qu’au fond de toutes ces formes sociales, — Famille, Propriété, État — il y a un besoin indubitablement légitime. Ce besoin doit être satisfait. Mais les formes sociales elles-mêmes apparaissent à la pensée critique comme insuffisantes. Elles doivent donc céder la place à des nouvelles formes plus rationnelles. La pensée critique a jugé, et condamné la vieille société. La classe ouvrière exécutera ce jugement par la révolution sociale…


VII

J’ai exposé aussi fidèlement que possible les idées directrices et fondamentales de Pierre Lavroff[1]. Le lecteur a ainsi tous les élé-

  1. J’ai laissé nécessairement de côté ses travaux spéciaux, notamment ceux qui se rattachent aux études anthropologiques, qui d’ailleurs ne sont que des résumés des recherches des spécialistes envisagées au point de vue des principes exposés ici-même.