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Page:Ratel - La Maison des Bories.pdf/119

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LA MAISON DES BORIES

— Qu’est-ce que tu dis ? souffla le petit garçon, brusquement pâli.

Le domestique éclata de rire :

— Eh ben ! quoi, c’est pas défendu ? Toi aussi, quand tu seras grand, tu feras la cour aux femmes.

— Jamais, gronda Laurent, farouchement. Et pis d’abord, maman, c’est pas une femme. C’est maman.

— Sacré petit phénomène ! dit Ludovic en riant. Elle est faite comme les autres, va !

Et il se mit à chanter la chanson-miaou, qu’il avait apprise autrefois d’une femme de chambre :

Mac-Mââhon,
Monte lââ-haut,
— Faire quoâ-â ?
— L’amour à mo-â-â…

Les yeux de Laurent s’obscurcirent, sa mâchoire inférieure avancée tendit son menton raide et grelottant, et tout à coup il se rua sur Ludovic, les poings en avant :

— Cochon ! Sale cochon !

L’autre continuait à rire en esquivant lestement ses attaques. Laurent, ivre, allait donner contre les murs, contre les meubles, se ramassait avec une respiration sifflante de coqueluche et se ruait de nouveau dans le vide. Finalement, il se laissa tomber sur le parquet, qu’il martela de ses poings, hoquetant et grinçant des dents, Ludovic riait aux larmes.

Laurent, tout à coup, releva la tête, regarda le domestique et se mit debout :

— Regardez-moi cet idiot qui rit, gronda-t-il d’une voix sourde et frémissante, cet idiot, ce cochon, ce voyou ! Maman me l’avait bien dit, que tu n’étais qu’un voyou !

Il tira violemment la porte à lui et disparut.

Ludovic ne riait plus.