Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/417

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juger les actions. On conçoit comment des citoyens achètent tous les jours, par le ſacrifice de leur liberté, les douceurs & les commodités de la vie auxquelles ils ſont accoutumés des l’enfance : mais que des peuples à qui la nature brute offroit plus de bonheur que la chaîne ſociale qui les uniſſoit, reſtâſſent tranquillement dans la ſervitude, ſans penſer qu’il n’y avoit qu’une montagne ou une rivière à traverſer pour être libres : voilà ce qui ſeroit incompréhenſible, ſi l’on ne ſavoit combien l’habitude & la ſuperſtition dénaturent par-tout l’eſpèce humaine.

Pluſieurs des provinces qu’on pouvoit regarder comme faiſant partie de cette vaſte domination ſe gouvernoient par leurs premières loix & ſelon leurs maximes anciennes. Tributaires ſeulement de l’empire, elles continuoient à être régies par leurs caciques. Les obligations de ces grands vaſſaux ſe réduiſoient à couvrir ou à reculer les frontières de l’état lorſqu’ils en recevoient l’ordre ; à contribuer ſans ceſſe aux charges publiques, originairement d’après un tarif réglé, & dans les derniers tems ſuivant les beſoins, l’avidité ou les caprices du deſpote.