Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/536

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

bouleverſent ce globe & dont la peinture vous plaît, par les ſecouſſes violentes que vous en recevez, & par les larmes moitié délicieuſes, moitié amères qu’elles arrachent de vos yeux ſouilleront la ſuite de ces déplorables annales. Êtes-vous méchant ? êtes-vous bons ? Si vous étiez bons, vous vous refuſeriez, ce me ſemble, au récit des calamités ; ſi vous étiez méchans, vous l’entendriez ſans pleurer. Cependant vous pleurez. Vous voulez être heureux, & c’eſt du malheur qu’il faut vous entretenir pour vous intéreſſer. Je crois en entrevoir la raiſon. Les peines des autres vous conſolent des vôtres, & l’eſtime de vous-même s’accroît par la compaſſion que vous leur accordez.

Il n’y a dans toute la Californie que deux garniſons de trente hommes chacune, & un ſoldat auprès de chaque miſſionnaire. Ces troupes étoient choiſies par les légiſlateurs & à leurs ordres, quoique payées par le gouvernement. La cour de Madrid n’avoit pas vu d’inconvénient à laiſſer ces foibles moyens à des prêtres qui avoient acquis ſa confiance, & on l’avoit bien convaincue que c’étoit le ſeul expédient qui pût préſerver ſes nou-