Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v4.djvu/284

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marchand une eſcorte qui l’aide à conduire juſqu’à la frontière les draps & les troupeaux qu’il a reçus en paiement.

Ce n’eſt pas au fond des forêts ; c’eſt au centre des ſociétés policées qu’on apprend à mépriſer l’homme & à s’en méfier. Si un de nos marchands, dans une de nos foires, diſtribuoit indiſtinctement ſes effets, ſans garantie, ſans sûreté à tous ceux qui tendroient leurs mains pour les recevoir ; croyez-vous qu’il en reparût un ſeul avec le prix de la choſe qu’il auroit achetée ? Ce que des hommes, ſous l’empire de l’honneur & des loix religieuſes & civiles, ne rougiroient pas de faire, un ſauvage, affranchi de toute eſpèce de contrainte, ne le fera pas. Ô honte de notre religion, de notre police & de nos mœurs !

Juſqu’en 1724, on vendit à ces ſauvages du vin & des eaux-de-vie, dont ils ont la paſſion comme preſque tous les peuples. Dans leur ivreſſe, ils prenoient les armes ; ils maſſacroient tous les Eſpagnols qu’ils rencontroient ; ils dévaſtoient les champs de leur voiſinage. Il eſt bien rare que le corrupteur ne ſoit châtié lui-même par celui qu’il a