Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v4.djvu/46

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tuellement des torrens ou des rivières dont les bords ſont toujours eſcarpés. Quatre ou cinq mille hommes, avec un peu de courage & d’intelligence, y feroient périr les armées les plus aguerries. Comment donc arriva-t-il qu’un grand peuple n’oſa pas même diſputer un terrein dont la nature devoit lui être ſi connue, à une poignée de brigands que les écumes de l’Océan venoient de vomir ſur ſes rivages ?

C’eſt par la même raiſon que le voleur intrépide, le piſtolet à la main, dépouille impunément une troupe d’hommes, ou qui repoſent tranquillement dans leurs foyers, ou qui renfermés dans une voiture publique continuent leur voyage ſans méfiance. Quoiqu’il ſoit ſeul & qu’il n’ait qu’un ou deux coups à tirer, il en impoſe à tous ; parce que perſonne ne veut ſe ſacrifier pour les autres. La défenſe ſuppoſe un concert de volontés qui ſe forme avec d’autant plus de lenteur, que le péril eſt moins attendu, que la sécurité étoit plus entière, & qu’elle avoit duré plus long-tems. Or c’étoit le cas des Péruviens. Ils vivoient ſans inquiétude & ſans trouble depuis pluſieurs ſiècles. Ajoutez à ces con-