Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/360

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heureuſes que nos peuples civilisés. Si la condition de l’homme brut, abandonné au pur inſtinct animal, dont une journée employée à chaſſer, ſe nourrir, produire ſon ſemblable & ſe repoſer, devient le modèle de toutes ſes journées, eſt meilleure ou pire que celle de cet être merveilleux, qui trie le duvet pour ſe coucher, file le coton du ver à ſoie pour ſe vêtir, a changé la caverne, ſa première demeure, en un palais, a ſu varier ſes commodités & ſes beſoins de mille manières différentes.

C’eſt dans la nature de l’homme qu’il faut chercher ſes moyens de bonheur. Que lui faut-il pour être auſſi heureux qu’il peut l’être ? La ſubſiſtance pour le préſent ; &, s’il penſe à l’avenir, l’eſpoir & la certitude de ce premier bien. Or, l’homme ſauvage, que les ſociétés policées n’ont pas repouſſé ou contenu dans les zones glaciales, manque-t-il de ce néceſſaire abſolu ? S’il ne fait pas des proviſions, c’eſt que la terre & la mer ſont des magaſins & des réſervoirs toujours ouverts à ſes beſoins. La pêche ou la chaſſe ſont de toute l’année, ou ſuppléent à la ſtérilité des ſaiſons mortes. Le ſauvage