Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/221

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Nous nous étions approchés du moine et des deux commères pour ne rien perdre de la dispute.

— Qu’y a-t-il ? demanda l’abbé Coccone qui, se tenant mal en selle, arrivait au pas de crainte de tomber.

— C’est cette sale pouffiasse de moine qui vient d’écraser le pauvre innocent.

— Si c’était un innocent, remarqua l’abbé Coccone, il faut se réjouir qu’il ait quitté la terre, car il est au ciel à présent, tandis que, s’il était demeuré parmi vous, il aurait bien pu manquer son paradis.

À l’idée que son enfant était un petit ange avec une tête sans corps et des ailes attachées au cou, ainsi qu’elle en voyait le dimanche à son église, dans un tableau d’autel ; la bonne femme releva de nouveau sa robe sur sa figure et sanglota plus fort. Sa grasse compagne, qui avait fini de pleurer, lui frappait de petits coups dans le dos et promenait sur nous des yeux de vache ahurie.

— Bêlez pas comme ça, répétait-elle, vous allez vous enrayer la voix.

— Je suis sûr qu’il n’y a pas seulement une heure, fit Arrivabene, elle se tournait le sang à morigéner cette engeance.

Mais la paysanne était inconsolable et rappelait ses souvenirs.

— La pauvre fiotte, quand elle faisait « bou, bou », sur sa soupe, je croyais toujours voir ma pauvre défunte maman, lorsque sa tête déménagea.

— Voyons ! s’écria Arrivabene, cet enfant était donc de la graine du père Nicéphore, dont on a perdu l’espèce, voilà cent ans ? Voulez-vous que je vous en refasse un autre ?

Cependant la femme, du coin de sa jupe, s’essuyait lentement le bord de ses paupières. Soudain, cessant