Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/240

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Pour chasser.

— Non, pour commettre un crime !

Il n’eut pas l’air d’avoir entendu ma réponse et, avec la plus complète indifférence, il laissa retomber sur le lit sa tête lourde de sommeil. Il me parut que le sort se prononçait franchement contre ma confidence. Je ne voulus point la renouveler, mais plutôt oublier tout ce que j’avais entendu, car je m’imaginais que la connaissance d’un secret si redoutable allait me rendre complice ou victime des meurtriers.

Le lendemain, au soleil levant, il me fut aisé de croire à un mauvais rêve. Les paroles du cardinal s’étaient déjà, pour la plupart, envolées de mon souvenir, et, comme je n’avais pu toutes les comprendre, qu’elles ne m’apprenaient rien de certain, je m’ingéniais, devant les belles promesses de l’aube, à leur donner une interprétation rassurante. J’étais donc fort calme lorsque je descendis me promener avec Fasol. J’avais rabattu mon capuchon sur les yeux et je réussis à franchir, sans encombre, le seuil du couvent. Le petit frère essaya bien de me voir le visage et de me tâter les reins, mais je me dérobai prestement à sa désagréable inspection.

Devant la porte nous trouvâmes l’abbé Coccone qui s’entretenait avec un moine court et rougeaud.

— Frère Simpliciano, disait l’abbé Coccone, ces excès d’austérité m’effraient. Il est contraire à notre sainte religion d’attenter au bien-être et à la santé de notre corps.

— Mais, seigneur abbé, reprenait le moine, toutes ces pénitences, qui vous font peur, nous rendent les plus heureux des hommes. C’est en cela que nous nous distinguons des autres religieux, qui n’acceptent la règle qu’en maugréant. Notre amour pour Dieu est