Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/272

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Mais au même moment, j’aperçus près de moi le cardinal et l’abbé Coccone. Ils me regardèrent en passant, et je suis certaine qu’ils me reconnurent ; seulement ils détournèrent très vite la tête comme s’ils ne m’avaient pas remarquée. Ils se chuchotaient à l’oreille, mais j’ai l’ouïe fine et j’entendis parfaitement leurs paroles.

— Nous avons bien manqué notre coup à Venise. Nous pouvons reprendre ici la comédie. À la campagne, et jouée par l’homme que j’ai sous la main, elle ne peut manquer d’avoir du succès !

À travers la foule des paysans qui, d’un pas lourd, pesant et endormi, se rangeaient sur leur passage, ils se frayèrent une voie jusqu’à la chapelle où ils entrèrent avec beaucoup de recueillement et de solennité.

— Que voulez-vous donc, madame ? me répétait Paola.

Hélas ! je n’osais plus rien lui avouer, comme si l’apparition de mes ennemis avait subitement glacé les mots sur mes lèvres. Et je ne sus que lui faire cette inutile remarque :

— Votre croix est de travers, mademoiselle.

Cependant Fasol avait déjà posé le pied sur le seuil de l’église, amusé par la bigarrure des costumes.

— Entre, si tu veux, lui dis-je, moi je demeure ici ; j’ai besoin d’air.

Alors, laissant la noce s’engouffrer dans la chapelle, nous restâmes à nous promener aux alentours du château.

Le mot de noces avait éveillé le caquet de toutes ces dames, jeunes et vieilles, qui entouraient Nichina. Pour quelques instants, elles n’écoutèrent plus le