Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/323

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gnation disparut, je devins folle de rage, je proférai les plus sales insultes.

Je poussais de tels hurlements que les gens de l’ostérie s’en émurent et vinrent demander ma grâce à travers la porte, sans compatir d’ailleurs le moins du monde à mes souffrances.

— Messer, cria l’hôtelier, pour la bonne renommée de cette maison, je vous supplie de ne pas faire un tel tapage.

— D’autant plus, ajouta sa femme, que vous empêchez de dormir un seigneur d’importance qui couche à côté de vous.

— Laissez-moi tranquille, dit Fasol, je corrige ma chienne !

— Au moins, fit l’aubergiste, si vous la frappez, empêchez-la donc de hurler de la sorte !

Mais Fasol ne s’occupa point de leurs prières. Il me traita en bête et moi, dans l’excès de ma douleur, oubliant mon sexe, à bout d’injures et d’outrages, je me vengeai aussi en bête, je lâchai mes excréments à la face de mon bourreau. Cette dérision dégoûtante l’enragea ; poussant sa barbarie à l’extrême, il prolongea mon supplice jusqu’à ce qu’il fût las de me fouetter. Alors, après avoir contemplé mes chairs ruisselantes de sang, il me délia et me jeta par les épaules dans une petite chambre qui se trouvait à côté de la sienne et où il y avait un peu de paille.

Quelle nuit je passai, mon Dieu ! Jusqu’à l’aube, l’humiliation, la peur de nouvelles tortures, le feu sans cesse avivé qui dévorait mon corps meurtri, me tinrent en éveil et m’arrachèrent des gémissements. Je m’endormais à peine lorsqu’un domestique vint me chercher pour partir.

— Eh bien ! la belle, dit-il d’un ton narquois en secouant la tête, votre seigneur vous a bien arrangé